2021
Dec 
29

traverser les espaces crépuscules

Filed under: Journal Débordé — lapeauaimante @ 18:39  

Je marche vers le crépuscule pour attraper les lueurs roses et jaunes
Du jour qui meurt sans que je l’aie touché
Je marche et pense que si j’étais encore enfant, je courrais
Je réalise que si j’ai la chance de vieillir je ne pourrais plus courir
Alors
Je cours

Je cours avec mes bottes boueuses
Et traverse l’espace qui me sépare des profondeurs
Les oiseaux qui s’abreuvaient à la mare croupie s’envolent sur mon passage
Je cours à travers les ronces et les genêts sans fleurs
Je cours et je souris
Haletante
Cherchant par ma course à reconquérir les refuges de l’enfance

Je m’enfonce dans la forêt pour trouver le rouge du ciel qui s’éteint
Je n’atteins pas la plaine
Il fera noir au retour si je vais plus loin
Il me faudrait un arbre
Une branche amie qui me porte à sa cime
La nuit mange vite les couleurs alors
À la place
Je me penche sur un rocher moussu
Gorgé de pluie qui inonde les tissus recouvrant la pudeur

Il ne fait même pas froid en cette fin décembre
Il ne fait même pas peur, même pas faim, pas même mal ailleurs qu’à l’esprit

Les nuages brûlent et flamboient comme le bout de ma cigarette
J’écoute le vent dissiper la fumée des idées ressassées qui m’embrument

Je repars par le même chemin
Les mêmes ronces et les mêmes genêts
À peine écrasés par ma précédente marche
Je ramasse quelques branches que je traîne dans le pré
Elles serviront à nourrir le feu affaibli par la somme de brindilles des faits
Qui m’empêchent de lire la magie atteignable du monde

Je retire mes habits de chantier et m’attelle au désordre des mots
J’assouplis la distance qui sépare le vrai du faux
Je redonne au langage une nouvelle chance

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