2023
Feb 
22

éboulis

Filed under: Journal Débordé — lapeauaimante @ 20:44  

quand ça va trop vite

qu’il y a trop de données

quand le véhicule terrestre que j’habite est plein à ras bord

quand la tête envoie à mes lèvres mille signaux depuis mon ventre

il n’y a pas de tri

ça capote

 

un écran blanc s’interpose entre la somme d’informations que mon corps traite

et ce qu’il conviendrait de dire ou de faire

ça ne passe pas

quelque chose bloque, se met en travers

parfois il n’y a rien qui sort

ou alors par bribes

ça bute

ça ne veut pas

les cailloux dégringolent

éboulement sur la voix

 

il y a une digue

quelque chose bégaye

quelque chose cherche à soulever l’éboulis

une bête que le bruit effraie

 

c’est un déferlement et je dois l’endiguer

pour éviter que tout ne sorte abruptement

je dois y remettre le ton, je dois y déposer du temps

je n’ai pas d’autre choix que d’écrire un poème

ça cogne aux oreilles de l’autre et je ne sais pas ce qu’il en restera

il faudrait attendre que ça vienne du bon endroit

 

les parois ont été reformées avec des pierres et du plâtre de piètre qualité

ça ne tient pas

mais ça fait bien

c’est propre

c’est blanc

c’est lisse

c’est sec

de loin on s’y croirait

un lieu idéal

un artifice

 

quelque chose brûle

laisse s’écrouler l’édifice

 

essuyer les plâtres

passer la main sur les parois

les anciennes couches s’effritent

tout ce qui ne tient pas tombe

reste à mes pieds un tas de gravas éboulés

 

le revêtement d’avant tombe en croûte

les couches de papier peint se décollent à peine

c’est gluant

je malaxe la pâte qui redevient chair au sous sol

c’est vivant

 

la maison a été reconstruite

transformée en cabane

un abri sous mes mains

je reprends mon chemin

 

qu’y a t’il de l’autre côté?

d’autres montagnes

un nouvel horizon

tu n’es pas arrivée

il faudra redescendre et trouver une nouvelle voie d’accès

 

je me tiens sur la crête

il y a un basculement possible

et j’ignore ce qu’il y a de l’autre côté

je pourrais mourir d’incandescence aussi bien que d’ennui

dévaster la forêt de la fougue qui m’habite

ou vivre à peine l’équivalent d’un transport de fourmi sur l’échine des géantes

 

c’est peut-être plus simple que ce que tu espères

le plein soleil, l’éblouissement, ça ne dure que quelques minutes

c’est une autre lumière qui succède aux pleins feux du zénith

c’est peut-être moins raide que ce que tu redoutes

 

une fois arrivée au sommet

clamer la joie d’être là

jouir

No Comments

Sorry, the comment form is closed at this time.