2022
Aug 
30

Méduser

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  • Danse
  • — lapeauaimante @ 17:27  

    Même dans la neige
    Par moins dix degrés
    Réunir soixante gens
    De vingt à soixante ans
    Toustes blanc.hes
    Comme la neige
    Parlant toustes le même langage
    Immaculé de mots

    La danse

    Cela ne sert à rien
    Cela n’a pas vocation à changer quoique ce soit
    Si ce n’est
    Notre rapport aux autres
    Notre rapport au corps
    Notre rapport au temps, à l’espace et à tous les invisibles qui nous peuplent

    Il y a une peau au-delà du corps physique
    Qui transmet des messages
    Plus subtils qu’un geste
    Plus précis qu’une flèche
    Qui peut prévoir, c’est-à-dire
    Voir avant
    Voir avant le prochain mouvement
    Et s’organiser en conséquence
    L’enveloppe non physique perçoit et donne des informations que les mots ne parviennent pas à exprimer
    Les mots sont lents, même s’ils fusent parfois trop vite.
    Ils disent “tais-toi” au lieu de “j’ai besoin de silence”
    Ils disent “je t’aime” à la place de “ta présence me rassure”

    La couche qui flotte, malléable, au-dessus de la peau,
    Est à l’intersection du sensible et du vocable.
    Elle parle
    Autrement qu’avec de la pensée.
    Elle parle à une part de nous à la fois plus vaste et plus intime.
    Elle est le corps médusoïdal
    Fait de la même membrane qui innerve le ciel constellé d’inatteignables planètes
    Et qui inonde, dans le même temps, les innombrables câbles de notre corps palpable.
    Et ce n’est pas une mince affaire que d’arriver à traduire en termes acceptables ce que l’immense fait passer à travers nos cellules
    Ce que nous retenons des histoires qui circulent en cercle en face à face, en diagonale,
    Ce que nos mouvements trahissent des profondeurs de l’être que nous incarnons maintenant.

    Tout se mélange.
    Mon sourire et le tien
    Yeux ouverts derrière paupières fermées
    Barricades du cœur derrière grands bras ouverts
    Joie molle derrière lèvres exaltées
    Tendresse derrière désir
    Amour immense derrière insondable silence
    Et tous nos je mêlés.
    Les Je qui disent On
    Qui disent Tu
    Qui disent des choses que j’ignore
    Les Nous qui rassemblent les puissances éparses que j’appelle de mes vœux
    Des espoirs de Vous qui se nouent

    Une ultime dispersion
    Quelque chose de tout à fait spécial et d’absolument banal
    Une danse
    Un instant de danse qui dure
    Sans qu’on sache combien de temps ni même avec qui
    En sortir à la fois pleine et moins remplie
    Plus légère
    Additionnée de teintes neuves
    Soustraite aux répétiteurs tyrans.

    Si ton geste est faux, forcé, fendu par ta volonté,
    La moelle gélatineuse qui ondoie à tes côtés se fera moins poreuse au rythme et à la durée
    De réceptrice extratranslusensible
    Elle passera à parchemin à peine movible
    On pourra seulement y lire l’ensemble des traces laissées par toi tout autour.
    La question est de savoir
    Quelles interactions tu veux construire avec le monde qu’il t’est donné de sentir?

    Éprouve.

    Chaque petit trou de foret qui s’ouvre à travers toi.
    Il pourrait t’agrandir.
    T’offrir la canopée que tu espères pour construire un repère nomade.
    Une réserve indienne faite de nos propres lois.
    Un passage secret entre le monde et soi.

    Le corps.
    Dernier refuge de l’éphémère.

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