sur la jetée II
Sais-tu combien de fois, j’ai voyagé trop lourd ?
Trop lourd de pertes, de manque, et trop vide d’amour ?
Je portais toutes mes luttes, mes faillites et mes peines dans un trop lourd cabas.
Je laçais des espoirs dépassés pour n’en perdre pas une miette
Paniers percés cent fois raccommodés
Pour quoi?
J’entretenais ma déroute aux abords des villes
Il me plaisait de dire:
Avec les pierres qu’il reste, je construis un château
Avec les pierres qu’il reste, je construis un chemin
Le nouveau s’installait pour quelque temps au moins
Jusqu’aux prochaines batailles que les grands vents soulevaient
Je nettoie les empreintes de tout ce dont je doute
Tout ce dont je me plains, tout ce que je redoute
Ce qui nuit, ce qui ronge
le grand tapage des objectifs bafoués
les outrages oubliés
Oubliés mais repris, de justesse. Repliés.
Je pose sur la route ce qui me brise le dos
je décrispe les doigts qui s’attachent aux balises
bouées rouges du passé, misérables messagères
Délestée de tout poids, je me rends aux marées
Je n’en fais plus le cas
Je m’en vais, nue et légère
En plein vent
Dans la plaine
No Comments